La fiscalité de l'assurance-vie s'est encore compliquée avec la création de la flat tax. Comment s'articulent les différents régimes ?
Par Marie-Christine Sonkin
« La loi de finances pour 2018 a apporté des modifications importantes au régime fiscal des produits issus des contrats de capitalisation et d'assurance-vie. Il existe désormais un régime dual d'imposition de ces produits selon la date des versements des primes auxquels ils se rattachent», explique Anne-Sophie Sarrazin, avocate au cabinet Fidal.
Les produits attachés à des primes versées jusqu'au 26 septembre 2017 sont imposés selon le régime applicable avant la réforme. Les produits attachés à des primes versées à compter du 27 septembre 2017 sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 30 % au même titre que les autres revenus mobiliers.
Attention, les produits des contrats d'assurance-vie et contrats de capitalisation n'entrent pas dans le champ d'application du prélèvement à la source. Ils n'entreront donc pas en 2018 dans le calcul du CIMR. Ces revenus 2018 feront l'objet d'une imposition qui sera liquidée en septembre 2019.
primes versées jusqu'au 26 septembre 2017champ d'application du prélèvement à la sourcecalcul du CIMR
Le régime d'imposition n'est pas modifié. Ces produits sont donc imposés suivant le régime applicable avant l'instauration du prélèvement forfaitaire unique (voir tableau). Pour les rachats réalisés à compter du 1er janvier 2018 sur des contrats souscrits avant le 26 septembre 2017, la taxation au prélèvement forfaitaire unique sera impossible.
Si aucun retrait n'est effectué, les gains réalisés au sein du contrat ne sont ni taxés ni distribués. En cas de rachat ou de dénouement, seule la fraction du rachat représentative des gains réalisés sera soumise à l'imposition, le capital investi n'est pas imposé. Le régime fiscal de ces contrats varie selon la date à laquelle ils ont été souscrits.
Pour les contrats primes versées à compter du 26 septembre 1997, les profits réalisés sont imposables soit au barème progressif, soit sur option au prélèvement libératoire. Dans cette hypothèse, le taux d'imposition varie en fonction de la durée effective du contrat (voir tableau).
Les contribuables peuvent avoir intérêt à opter pour le barème progressif de l'impôt sur le revenu lorsque leur tranche marginale d'imposition est inférieure au taux du prélèvement forfaitaire libératoire.
Pour les contrats détenus depuis au moins huit ans, les produits acquis ne sont soumis au barème progressif de l'IR qu'après application d'un abattement annuel de 4.600€ (personnes seules) ou 9.200 € (couples soumis à une imposition commune). Si le contribuable étale ses retraits sur plusieurs années, il pourra donc bénéficier chaque année de l'abattement de 4.600 € ou 9.200 €.
En cas d'option pour le prélèvement forfaitaire libératoire, les produits sont imposés aux taux forfaitaires suivants :
– 35 % lorsque la durée du contrat est inférieure à 4 ans ;
– 15 % lorsque cette durée est supérieure ou égale à 4 ans ;
– 7,5 % si la durée est égale ou supérieure à 8 ans.
Depuis l'imposition des revenus 2017, l'abattement annuel de 4.600 € ou 9.200 € prend la forme d'un crédit d'impôt. Ce crédit d'impôt est imputable sur l'impôt sur le revenu dû l'année suivante et en cas d'excédent restituable.
Soit un contribuable célibataire percevant, en 2018, des produits attachés à un contrat souscrit en 2006 pour lequel aucun versement n'a été effectué depuis le 27 septembre 2017.Montant des produits perçus : 15.000 €.Option pour le prélèvement libératoire (contrat détenu depuis plus de 8 ans) :15.000 € × 7,5 % = 1.125 €.Crédit d'impôt : 4.600 € × 7,5 % = 345 €, imputable sur l'impôt dû en 2019 au titre de l'ensemble des revenus de 2018.
Les produits de ces contrats, par hypothèse souscrits depuis plus de huit ans, se répartissent en trois groupes :
– les produits versés avant le 26 septembre 1997 sont exonérés ;
– les versements effectués du 26 septembre 1997 au 31 décembre 1997 sont exonérés à condition qu'ils aient été réalisés :
– soit en exécution d'un engagement antérieur ;
– soit, dans la limite de 200.000 francs à titre exceptionnel ;
– les produits des versements effectués à partir du 1er janvier 1998 sont soumis au même régime que les produits des contrats souscrits depuis le 26 septembre 1997 (voir précédemment).
Par exception, les produits des contrats à primes périodiques attachés aux versements n'excédant pas ceux prévus initialement sont totalement exonérés, quelle que soit la date des versements.
Pour les contrats souscrits avant le 1er janvier 1983, les produits retirés sont exonérés d'impôt sur le revenu. Par exemple, les versements effectués en 2015 sur des contrats souscrits en 1982 sont exonérés.
Sont aussi exonérés les contrats dits « DSK » (50 % au moins d'actions, dont 5 % de placements à risque) souscrits avant le 1er janvier 2005 et les contrats dits « NSK » (30 % au moins d'actions et 10 % de l'actif en placements à risque, parmi lesquels les titres non cotés doivent représenter au moins 5 %) souscrits du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2013 et d'une durée supérieure ou égale à 8 ans.
Tous les contrats de capitalisation et contrats d'assurance-vie sont soumis aux prélèvements sociaux (CSG, CRDS) de 17,2 %, taux applicable depuis le 1er janvier 2018.
Toutefois le taux historique*des prélèvements sociaux continue de s'appliquer pour les « produits qui ont été acquis ou constatés au cours des huit premières années suivant l'ouverture du contrat d'assurance-vie pour les contrats souscrits entre le 1er janvier 1990 et le 25 septembre 1997 ».
Dans les contrats en euros, ainsi que pour la part euro des contrats multisupports, les prélèvements sociaux sont directement précomptés chaque année par l'assureur, lors de l'inscription en compte des produits. Dans les contrats en unités de compte, les prélèvements sociaux ne sont dus que lors des rachats ou lors du dénouement du contrat par décès et sont précomptés par l'assureur à ce moment-là.
1. Un couple a souscrit un contrat d'assurance-vie en 1980 en y versant 20.000 €.En 2018, le contrat vaut 50.000 €, la plus-value s'élèvera donc à 30.000 €.Les produits retirés seront totalement exonérés d'impôt sur le revenu mais seront soumis aux prélèvements sociaux de 17.2 % soit 5.160 €. 2. Un couple a souscrit en 2005 un contrat d'assurance-vie en y versant 40.000 €. En 2018, le contrat vaut 90.000 €.La plus-value s'élèvera à 90.000 – 40.000 €, soit 50.000 €.En optant pour le prélèvement forfaitaire libératoire de 7,5 %, l'impôt sur le revenu s'élèvera à 3.750 €.Crédit d'impôt : 4.600 € × 7.5 % = 345 €, imputable sur l'impôt dû en 2019 au titre de l'ensemble des revenus de 2018.En sus, les prélèvements sociaux au taux de 17.2 % s'élèveront à 8.600 €. 3. Un couple a souscrit en 2012 un contrat d'assurance-vie en y versant 20.000 €. Six ans plus tard, le contrat vaut 25.000 €, soit une plus-value de 5.000 €.En optant pour le prélèvement forfaitaire libératoire de 15 %, l'impôt sur le revenu s'élèvera à 750 €. Les prélèvements sociaux s'élèveront à 860 €.
« Le contribuable peut étaler ses rachats pour bénéficier chaque année du crédit d'impôt (ou abattement) », souligne Anne-Sophie Sarrazin. Ainsi, en reprenant l'exemple 2, le couple pourra effectuer un rachat de 90.000 € en deux temps :
– un premier rachat de 45.000 € en 2018, avec une plus-value de 25.000 € ;
– un second rachat de 45.000 € en 2019, avec une plus-value de 25.000 €.
Il pourra ainsi bénéficier du crédit d'impôt au titre de chaque année : un crédit d'impôt de 345 € imputable sur l'impôt dû en 2019 au titre de ses revenus de 2018, et un crédit d'impôt du même montant imputable sur l'impôt dû en 2020 au titre de ses revenus de 2019. L'avantage fiscal est donc, dans cette hypothèse, doublé.
0,5 % sur les produits acquis en 1996, 3,9 % sur les produits acquis en 1997, 10 % sur les produits acquis entre le 1er janvier 1998 et le 1er juillet 2004, 11 % sur les produits acquis entre le 1er juillet 2004 et le 1er janvier 2009, 12,1 % sur les produits acquis en 2009 et 2010, 12,3 % sur les produits acquis entre le 1er janvier 2011 et le 1er octobre 2011, 13,5 % sur les produits acquis entre le 1er octobre 2011 et le 1er juillet 2012, 15,5 % sur les produits acquis entre le 1er juillet 2012 et le 31 décembre 2016, 17,2 % sur les produits acquis à compter du 1er janvier 2017.
Quelles que soient la date et la durée du contrat, les produits d'assurance-vie sont exonérés d'impôt sur le revenu lorsque la fin du contrat résulte d'un licenciement, d'une liquidation judiciaire, d'une invalidité (2e ou 3e catégorie) ou d'une mise à la retraite anticipée pour l'assuré ou son conjoint.
Marie-Christine Sonkin   
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