La loi du 16 août 2022, dite loi pouvoir d’achat, tend à accroître la protection des consommateurs, en facilitant la résiliation des contrats. La résiliation du contrat d’assurance est ainsi concernée.
Promulguée le 16 août dernier et publiée au Journal officiel du 18 août, la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat s’inscrit dans le contexte de la hausse des prix à la consommation, et en particulier du prix de l’énergie, liée au conflit en Ukraine. Elle poursuit trois impératifs : la protection du niveau de vie des ménages, la protection du consommateur et la souveraineté énergétique.
Le Titre II de la loi est plus spécialement consacré à la protection du consommateur. Dans cette perspective, un Chapitre 1er est consacré à la résiliation des contrats, qui se veut facilitée. Les articles 17 et 18, plus particulièrement, comportent des dispositions relatives à la résiliation du contrat d’assurance.
L’article 17, I, de la loi du 16 août 2022 modifie l’article L. 113-14 du code des assurances, relatif à la notification de résiliation du contrat d’assurance par l’assuré. Ce dernier prévoit actuellement que lorsque l’assuré a le droit de résilier le contrat, la notification de résiliation peut être effectuée soit par lettre ou sur tout support durable, soit par déclaration faite au siège social ou chez le représentant de l’assureur, soit par acte extra judiciaire, soit, lorsque l’assureur propose la conclusion du contrat par un mode de communication à distance, par le même mode de communication, soit par tout autre moyen prévu par le contrat. L’assuré choisit librement l’une de ces modalités. En pratique, la résiliation par lettre recommandée est le moyen le plus facile et le plus utilisé, tant par les assureurs que par les assurés (en ce sens, v. Y. Lambert-Faivre et L. Leveneur, Droit des assurances, 14e éd., Dalloz, coll. « Précis », n° 295). De son côté, le destinataire de la résiliation confirme par écrit la réception de la notification.
À l’avenir, la résiliation du contrat sera facilitée, puisque, selon l’article 17 de la loi, « lorsqu’un contrat d’assurance couvrant les personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles a été conclu par voie électronique ou a été conclu par un autre moyen et que l’assureur, au jour de la résiliation par le souscripteur, offre au souscripteur la possibilité de conclure des contrats par voie électronique, la résiliation est rendue possible selon cette même modalité ». En pratique, l’assuré pourra donc résilier le contrat d’assurance en ligne, grâce à un « bouton de résiliation », que le contrat ait initialement été conclu par voie électronique ou non. La seule condition est qu’au jour de la résiliation l’assureur propose un service de souscription en ligne. Gageons qu’à l’heure de la dématérialisation, cette faculté de résiliation « en trois clics » sera largement ouverte.
L’article 17 de la loi poursuit, en précisant que l’assureur met à disposition une fonctionnalité gratuite qui permet d’accomplir, par voie électronique, la notification et les démarches nécessaires à la résiliation du contrat. Il ajoute que ces dispositions entrent en vigueur à une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure au 1er juin 2023. À partir du 1er juin 2023 au plus tard, les assureurs devront donc prévoir un « bouton résiliation » en ligne facilement accessible.
Ces dispositions s’inscrivent dans une tendance générale permettant à l’assuré consommateur de résilier aisément le contrat d’assurance. La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite « loi Hamon », avait déjà marqué une évolution majeure, en ouvrant au consommateur une faculté de résiliation infra annuelle. Ainsi, pour les contrats d’assurance relevant de certaines branches (sont notamment visées par l’article R. 113-11 du code des assurances l’assurance automobile et l’assurance habitation) et qui sont tacitement reconductibles, l’assuré peut résilier, à tout moment, sans frais ni pénalité et sans préavis, à l’expiration du délai d’un an à compter de la conclusion du contrat (sur les apports de la loi Hamon en matière de contrat d’assurance, v. J. Bigot, La loi Hamon et le contrat d’assurance, JCP 2014. Doctr. 634). Après avoir été facilitée sur le fond, la résiliation sera donc encore facilitée, cette fois sur la forme, avec la loi du 16 août 2022.
On peut se réjouir de cette volonté de faciliter la résiliation du contrat d’assurance, qui permettra aux consommateurs de profiter plus facilement des offres les plus attractives du marché. Une limite peut toutefois être relevée. Il existe un risque de résiliation à la légère du contrat. Il suffira en effet à l’assuré de cliquer sur un simple bouton en ligne. Or, la résiliation d’un contrat d’assurance ne doit pas être faite à la légère. Elle entraîne l’extinction du contrat et met fin aux obligations des parties. La garantie de l’assureur disparaît donc pour l’avenir (sur les effets de la résiliation, v. Y. Lambert-Faivre et L. Leveneur, op. cit., n° 299). En ce sens, on ne peut qu’approuver la suite de l’article 17, qui oblige l’assureur à informer l’assuré, lors de la confirmation de réception de la notification de résiliation, de la date à laquelle le contrat prend fin et des effets de la résiliation, cela sur un support durable et dans des délais raisonnables. Cette obligation d’information est ainsi de nature à attirer l’attention de l’assuré sur les conséquences de la résiliation.
Reste à déterminer quelles vont êtres les modalités techniques de la mise en place de ce « bouton résiliation ». En effet, cette résiliation facilitée du contrat ne va pas sans soulever des problèmes pratiques : comment être sûr que celui qui résilie derrière l’écran d’ordinateur ou de smartphone est bien l’assuré ? Où doit se situer ce bouton précisément ? Sur ce point, l’article 17 précise qu’un « décret fixe notamment les modalités techniques de nature à garantir une identification du souscripteur ainsi qu’un accès facile, direct et permanent à la fonctionnalité mentionnée au deuxième alinéa du présent II, telles que ses modalités de présentation et d’utilisation. Il détermine les informations devant être fournies par le souscripteur ». Il faudra donc attendre le décret pour savoir concrètement quels seront les moyens mis en œuvre. On peut imaginer, par exemple, qu’il sera nécessaire de se connecter avec un identifiant et un mot de passe associé afin de résilier le contrat. Une procédure de double vérification pourrait également être envisageable, à l’image de ce qui existe pour les paiements en ligne.
L’article 18 de la loi, dont les dispositions entrent en vigueur au 1er janvier 2023, apporte des modifications concernant l’assurance affinitaire, vendue en complément d’un bien ou d’un service, aussi appelée « extension de garantie ». L’article L. 112-10 du ode des assurances prévoit actuellement que le consommateur qui conclut un contrat d’assurance affinitaire peut, s’il justifie d’une garantie antérieure pour l’un des risques couverts par ce nouveau contrat, renoncer à ce nouveau contrat, sans frais ni pénalité et tant qu’il n’a pas été intégralement exécuté ou que l’assuré n’a fait intervenir aucune garantie, dans les quatorze jours qui suivent la conclusion du contrat. Cette faculté de renonciation avait été mise en place par la loi Hamon du 17 mars 2014, et avait pu être critiquée pour sa complexité. Notamment, elle impliquait que l’assuré soit, en pratique, en mesure de vérifier, dans un délai de quatorze jours, s’il possédait déjà une garantie suffisante. Certains considéraient alors qu’il eut été plus simple d’offrir au consommateur une faculté de résiliation (v. J. Bigot, préc.).
L’article 18 de la loi du 16 août 2022 tend visiblement à simplifier le processus. Il prévoit en effet la suppression des mots « s’il justifie d’une garantie antérieure pour l’un des risques couverts par ce nouveau contrat », ce qui signifie que le souscripteur pourra mettre fin au contrat sans avoir à justifier cette renonciation par le fait d’être déjà couvert. Il n’est donc plus question de contraindre l’assuré à vérifier si oui ou non il possède déjà une garantie suffisante. En conséquence, les deux dernières occurrences du mot « nouveau » sont supprimées. De plus, le délai de renonciation est allongé, puisqu’il passe de quatorze à trente jours. Il est ajouté que « lorsque l’assuré bénéficie d’une ou de plusieurs primes d’assurance gratuites, ce délai ne court qu’à compter du paiement de tout ou partie de la première prime ». Ainsi, non seulement le délai de renonciation au contrat est plus long, mais son point de départ est reporté dans le cas où l’assuré bénéficie d’une ou plusieurs primes gratuites. Il ne commence à courir qu’à partir du paiement de la première prime. Pratiquement, le souscripteur pourrait ainsi renoncer au contrat plusieurs mois après sa conclusion, sans avoir à justifier d’une garantie préexistante, pour éventuellement souscrire une autre garantie, plus avantageuse.
Les articles 17 et 18 de la loi du 16 août 2022 poursuivent ainsi l’objectif affiché, qui est la protection du consommateur. Ils lui permettent de résilier facilement un contrat d’assurance, et de bénéficier des offres les plus attractives du marché. Des interrogations demeurent tout de même. S’agissant de la résiliation par voie électronique, il faut encore attendre le décret qui en fixera les modalités pratiques. Nous émettons également une réserve sur le risque d’une résiliation trop facile. Il importe que l’assuré ait conscience qu’en cliquant sur un simple bouton, il fait disparaître une couverture, parfois obligatoire. La bonne information de l’assuré sur les conséquences de la résiliation est, selon nous, un point crucial. Il ne faudrait pas que la protection d’un individu en tant que consommateur conduise à une protection moindre du même individu, cette fois en tant qu’assuré.

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