L’assurance vie est très prisée des Français qui veulent organiser au mieux leur succession grâce à la fiscalité avantageuse de l’enveloppe. Mais elle peut aussi être un bon outil pour ceux qui souhaitent… déshériter leurs enfants. En partie, en tout cas. En effet, la transmission d’un contrat d’assurance vie se fait “hors succession”. Ainsi, le contrat n’est pas comptabilisé dans l’actif successoral partagé entre les héritiers. Du coup, au décès du détenteur du contrat d’assurance vie, les sommes placées reviennent au(x) bénéficiaire(s) choisi(s) par le détenteur (via la clause bénéficiaire), et non pas forcément aux héritiers.
Mais les enfants étant systématiquement considérés comme des “héritiers réservataires”, une partie du patrimoine du défunt leur est forcément réservée : ils ne peuvent pas être totalement déshérités. Si, avec l’assurance vie, vous pouvez bien désigner le(s) bénéficiaire(s) de votre choix, qu’il y ait un lien de parenté ou non, vous êtes dans l’obligation, en revanche, de réserver une partie de votre patrimoine hors assurance vie à vos enfants.
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Attention tout de même, pour déshériter (partiellement) vos enfants grâce à l’assurance vie, encore faut-il respecter certaines conditions afin d’éviter toute remise en question de l’opération.
Partons d’un récent arrêt rendu par la Cour de cassation. Un père de famille a souscrit plusieurs contrats d’assurance vie au profit de sa nouvelle conjointe, désignée comme seule bénéficiaire des capitaux décès. Pis, dans le cas où sa nouvelle partenaire décèderait avant de percevoir les fonds, ce sont les enfants – et donc les héritiers réservataires – de cette dernière qui recevront les sommes placées sur le contrat d’assurance vie.
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Les quatre enfants nés de la première union de notre père de famille ont alors tenté de remettre en cause cette opération devant la justice. En effet, “une action pour ‘primes manifestement exagérées’ peut être intentée par les héritiers réservataires”, explique Benoît Berchebru, directeur de l’ingénierie patrimoniale chez Nortia. Si les primes versées par le détenteur sont considérées comme “exagérées”, elles sont alors réintégrées dans l’actif successoral transmis au décès, et reviennent donc pour partie aux héritiers réservataires.
Problème, les “primes manifestement exagérées” n’ont jamais été clairement définies par le législateur. Il revient alors aux juges de fixer à partir de quand commence cette “exagération”. Autrement dit, cette évaluation se fait au cas par cas. Parmi les critères les plus souvent pris en compte, on retrouve évidemment la situation patrimoniale et le niveau de revenus du souscripteur, mais aussi son âge, ainsi que son état de santé, lors du versement des primes sur le contrat. L’utilité du contrat est également un critère retenu.
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Par exemple, pour un souscripteur “dont le pronostic vital [est] engagé […] et [qui n’avait pour mobile] que de faire échapper son patrimoine à sa succession au bénéfice de sa compagne”, les primes versées sur le contrat d’assurance vie sont considérées comme exagérées (Civ. 1e 6 février 2007, n°05-13.803).
Si nous reprenons le cas de notre père de famille qui a souscrit plusieurs contrats au profit de sa nouvelle compagne, “la cour d’appel a souverainement estimé que les primes versées pour la souscription de ces contrats n’étaient pas manifestement exagérées au regard de l’âge, des situations personnelles et familiale de l’intéressé et de l’utilité pour lui des placements ainsi réalisés”, peut-on lire dans l’arrêt du 6 novembre.
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En effet, en raison de son bon état de santé et de sa situation patrimoniale, il n’a pas été prouvé que ce père de famille a souscrit ces contrats dans l’unique but de déshériter ses enfants. D’autant qu’il a utilisé ces enveloppes pour lui, en réalisant plusieurs rachats partiels au cours de sa vie, et notamment un de 16.000 euros en avril 2007. La Cour de cassation a ainsi rejeté le recours des enfants de la première union, qui se retrouvent “écartés de tout droit de revendiquer la propriété des capitaux décès”, indique Benoît Berchebru.
Conclusion : si vous placez régulièrement et tout au long de votre vie de l’argent sur un contrat d’assurance vie dont le bénéficiaire est votre nouveau conjoint, et si vous le faites dans des proportions raisonnables au regard de votre situation patrimoniale et/ou de vos revenus, il y a très peu de chances pour que vos enfants puissent contester cette transmission le moment venu.
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