Si vous avez investi une partie de votre épargne dans des produits dédiés au financement de votre retraite, vous n’êtes pas à l’abri d’une mauvaise surprise. Car même si vous ne détenez pas directement des actions, le krach sur les marchés financiers peut affecter directement le rendement de votre épargne. Plan d’épargne retraite populaire (Perp), contrat Madelin (pour les travailleurs non-salariés) ou encore article 83… tous ces produits proposent une formule similaire : un fonds euros qui offre la garantie du capital et des supports risqués appelés unités de compte (UC). Il peut s’agir d’immobilier, d’obligations, de trackers… ou d’actions. Contrairement au fonds euros sur lequel le capital est garanti, les UC n’offrent aucune assurance de récupérer sa mise. C’est donc l’épargnant qui s’expose à une perte en capital.
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Sur un Perp ou un contrat Madelin, la majorité des encours est certes allouée sur le fonds euros mais une partie est investie en unités de compte. Avec l’effondrement des marchés financiers (-27% depuis le 1er janvier le 8 avril 2020), cette épargne est donc touchée indirectement. “Toutes les unités de compte ne sont pas investies en actions”, nuance tout de même Philippe Crevel, président du Cercle de l’Epargne. Selon Cyrille Chartier-Kastler, fondateur du cabinet Good Value for Money, “on peut estimer à 35%, voire 40%, la part des unités de compte en actions pures”. Et les épargnants sont de plus en plus exposés sur les marchés financiers, souvent sans le savoir, comme l’indique Guillaume Prache, délégué général de Better Finance, la Fédération européenne des épargnants : “Avec la loi Pacte et la création du PER, on a basculé dans la gestion à horizon avec plus d’unités de compte”, indique-t-il. Sur le nouveau plan d’épargne retraite créé en 2019, la gestion qui s’applique est en effet celle dite par horizon. Trois profils de risque sont proposés mais le fonctionnement est identique : plus l’âge de la retraite approche, plus l’épargne est sécurisée vers le fonds euros, le solde étant réparti entre différentes unités de compte.
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Pour un épargnant, le constat est simple : s’il a opté pour la gestion pilotée ou par horizon dans son PER, son exposition aux actions peut atteindre des pourcentages significatifs. En pilotage équilibré (profil moyen situé entre prudent et dynamique), l’allocation en unités de compte actions à 15 ans de la retraite peut encore facilement atteindre 30%. Avec une chute de 25% des cours de Bourse, l’impact peut ici se monter à 7,5% (30% x 25%) sur l’encours du plan en année pleine.
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Pour bien juger l’impact du krach des marchés actions sur l’épargne retraite des Français, il convient de s’attarder sur les contrats d’assurance vie. “Le produit numéro 1 d’épargne retraite, c’est l’assurance vie”, affirme Guillaume Prache. A la fin de l’année 2019, sur les 1.788 milliards d’euros placés sur ces contrats, “environ 23% l’étaient sur des supports en unités de compte”, détaille Cyrille Chartier-Kastler. La mise en place de barrières à l’entrée par de nombreux assureurs empêchant la souscription à 100% en fonds euros pousse ainsi la collecte en UC et la prise de risques des épargnants. “Je crains que l’effet de la baisse des marchés soit plus que proportionnelle pour les unités de compte”, avance par ailleurs Guillaume Prache, qui note l’importance des frais ponctionnés sur ces contrats. “En moyenne, les frais de gestion annuels sur les plans d’épargne retraite atteignent 4%”, constate pour sa part Charlotte Thameur, directrice conseil chez Yomoni, Fintech spécialisée dans l’épargne en ligne. Dans ce total, et toujours selon Charlotte Thameur, les frais de gestion sur les sociétés d’investissement à capital variable (Sicav) et fonds communs de placement (FCP) dont sont composées les unités de compte atteignent 2% !
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Illustration de la baisse subie par les épargnants : au 27 mars 2020 chez Yomoni, qui propose 10 profils de risque, le profil P6 (équilibré avec 50% d’actions) affichait une perte de 10,7% net de frais, le profil P10 (le plus risqué avec 100% d’actions) cédant 21% ! Sachant que les frais de gestion se bornent à 1,6% chez cet acteur parmi les moins chers du marché, il y a donc fort à parier que la baisse soit bien plus sévère pour certains épargnants. Autre conséquence néfaste de la crise sanitaire et économique, de nombreuses entreprises françaises ont dû renoncer au versement des dividendes à leurs actionnaires. “L’actionnaire perd un moteur significatif de la rentabilité de long terme. Le seul moteur est alors la valorisation du titre”, note Gilles Belloir, directeur général du courtier en assurance vie Placement-direct.fr. “Cela va donc impacter négativement celui qui possède les actions”, en direct mais également à travers une assurance vie ou un produit d’épargne retraite dédié. Un constat confirmé par Charlotte Thameur, qui tient toutefois à relativiser : “L’impact sera beaucoup moins important que si l’entreprise fait faillite.” Un moindre mal donc, sachant que, comme le rappelle Philippe Crevel, “les unités de compte actions ne sont pas composées que d’entreprises françaises”. D’autres continueront donc à verser des dividendes.
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Le tableau serait donc bien noir pour les Français qui ont opté pour la retraite par capitalisation. “Il faut que l’épargnant soit assez instruit pour comprendre que ses investissements retraite peuvent perdre 5% ou 10% momentanément mais que son horizon de placement est sur 5, 10 ou 20 ans”, rassure toutefois Pierre-Emmanuel Sassonia, directeur associé chez Eres, une société de gestion spécialisée dans l’épargne retraite. Epargner pour la fin de sa vie active s’entend en effet sur le long terme. “Quelqu’un qui ouvre un PER à 40 ans a 25 ans devant lui pour absorber une partie des pertes”, confirme Gilles Belloir. Le temps joue en effet pour l’épargnant, notamment sur le PER qui bénéficie de la gestion pilotée. Si le souscripteur d’un PER est proche de la retraite, il ne sera quasiment voire pas du tout exposé aux actions. A l’inverse, celui qui se trouve en début de phase d’épargne, à 30 ans de la retraite, dispose d’autant d’années pour “se refaire”. “Le côté mécanique est bon dans tous les cas”, tranche Gilles Belloir, qui reconnaît toutefois un inconvénient aux arbitrages automatiques effectués chaque année : “Le fait de dérisquer de manière automatique fait que l’on se coupe d’un retour à meilleure fortune. Mais ce phénomène est assez marginal.”
Dans l’optique de récupérer ce qu’ils ont perdu, les épargnants auraient donc intérêt à se tourner vers la gestion par horizon, qui reprend les codes de la gestion profilée (allocation par profil de risque) en y ajoutant la sécurisation progressive de l’épargne. Ce mode de gestion peut ainsi permettre de ne pas succomber aux fameux “biais comportementaux” humains qui poussent bien souvent l’épargnant à agir de manière irrationnelle et par exemple à effectuer des arbitrages dans son contrat pour passer d’actifs risqués au fonds euros garanti. Et ainsi encaisser ses pertes.
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Surtout, pour pallier la baisse, momentanée, des marchés financiers, la meilleure option reste d’effectuer des versements programmés. “Statistiquement, plus les versements sont étalés dans le temps, plus les chances d’acheter à la baisse sont élevées”, argue Charlotte Thameur. “Commencer à épargner pour sa retraite quand les marchés sont bas, et de manière régulière, peut être une bonne idée”, abonde Gilles Belloir. Une idée que ne réfute pas Guillaume Prache, qui rappelle simplement que “sur 20 ans, les fonds euros ont largement surperformé les unités de compte”. Selon les chiffres de Better Finance, les performances réelles (nettes de frais et d’inflation) des fonds euros atteignaient 39% sur 19 ans à fin 2018, celles des unités de compte s’affichant à… -23,9%.
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