Mal conçus ou vendus à mauvais escient, certains produits d’épargne sont un poids mort dans votre patrimoine. D’autres ont mal vieilli avec le temps. Qu’en faire ? Comment rebondir ?
Parfois, il est plus opportun de garder un placement jusqu'à son terme, même s'il se révèle de piètre qualité.
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Chaque année, tout un chacun pratique souvent un grand ménage de printemps. Pourquoi ne pas appliquer ce précepte à votre patrimoine ? Reconnaissons-le, ce dernier résulte souvent plus d’un empilement de produits que d’une construction élaborée… D’où l’importance, de temps à autre, de balayer le panorama de ce que vous possédez et de l’étudier à l’aune de vos besoins et de vos projets.
Cela vous conduira peut-être à réaliser que la photographie actuelle n’est pas idéale et nécessite quelques retouches. C’est aussi l’occasion de faire le bilan de ses produits d’épargne, dont certains ont parfois été souscrits des années auparavant. Se sont-ils dégradés avec le temps ? Correspondent-ils toujours à votre situation, qui a pu évoluer ? Quelle est leur qualité au regard de la concurrence du marché ? Si cette réévaluation est négative, il vous faudra prendre des mesures : vendre, clôturer, transférer, arbitrer… Mais la décision ne sera pas toujours la même selon votre profil et, sur tout, selon le produit concerné. Car chacun répond à des contraintes propres. Examinons le champ des possibles pour six grandes familles de placement.
La performance de ces produits structurés repose sur un scénario de marché fixé à l’avance. A l’échéance, le capital peut être garanti en totalité ou simplement protégé contre une baisse trop massive. Les supports commercialisés actuellement optent presque tous pour le même format : à date anniversaire, soit le fonds est remboursé par anticipation, avec un gain si l’objectif a été atteint, soit il repart pour un an. En outre, les formules ont été largement simplifiées. Avec de telles constructions, l’épargnant se trouve rarement bloqué plus de quelques années. Cela peut néanmoins se produire avec des produits plus anciens où vous vous retrouvez “collé” à un fonds qui sera, de manière certaine, incapable d’atteindre son objectif.
Ce que vous ne pouvez pas faire. Avec les fonds à formule, les dés sont jetés dès la souscription. Une fois le produit bâti, impossible de modifier les règles même si le marché change considérablement.
Ce que vous pouvez faire. Renseignez-vous d’abord sur la valorisation du produit pour savoir quelle décote vous encourrez. Vérifiez aussi si votre capital est seulement protégé ou s’il est garanti à 100 %. Dans ce dernier cas, ayez en tête que la garantie ne joue qu’au terme : il est donc plus sage de ronger son frein jusqu’à cette date ! En revanche, si votre support est fortement dévalué par rapport à son prix d’achat et que la protection est faible, gagez qu’elle ne pourra pas être activée. Ce sera par exemple le cas si votre capital est remboursé jusqu’à une perte de 30 % et que le fonds a perdu plus de 50 % de sa valeur. Dans une telle situation, mieux vaut encaisser la perte immédiatement pour repartir sur un placement plus performant.
Voilà une enveloppe aux multiples atouts, qui permet d’épargner, de faire fructifier son capital, de diversifier ses investissements, de transmettre son patrimoine, le tout dans un cadre fiscal particulièrement avantageux. Le hic : l’offre est pléthorique et en permanence renouvelée. Il est parfois difficile de sélectionner le produit le plus adapté à vos besoins. De plus, il est fréquent de constater une détérioration de son enveloppe après quelques années.
Jugez d’abord du rendement de votre fonds en euros par rapport à la concurrence. La moyenne des taux 2016 se situe à 1,80 %, mais certains ont servi moins de 1 %. Analysez aussi les frais : depuis quelques années, les assureurs ont revu leurs prétentions à la baisse. Comptez 3 % maximum de frais sur versement et 0,60 à 0,80 % de frais de gestion pour un produit compétitif. Enfin, l’offre financière et les diverses options du contrat constituent un autre point crucial.
Ce que vous ne pouvez pas faire. Contrairement à d’autres placements, l’assurance vie n’est pas transférable. Vous ne pourrez pas garder l’antériorité fiscale de votre contrat tout en changeant d’assureur. Bien que le sujet refasse régulièrement surface afin d’améliorer la concurrence dans ce secteur, les compagnies y sont farouchement opposées et ont toujours trouvé une oreille attentive auprès des gouvernements successifs.
Ce que vous pouvez faire. Heureusement, vous n’êtes pas pieds et poings liés pour autant ! Rappelons que vous disposez d’un délai de rétractation de trente jours après la souscription d’une assurance vie. Au-delà, vous pouvez encore y renoncer si vous n’avez pas reçu toutes les informations contractuelles prévues par la loi, pendant huit ans pour les contrats souscrits depuis 2006, sans limite de temps pour les autres, à condition d’être de bonne foi. En dehors de ces cas, que faire si vous détenez un contrat manifestement médiocre ? Il existe plusieurs solutions, mais quelques précautions s’imposent.
D’abord, vous pouvez souscrire un nouveau produit pour accueillir vos prochains versements. N’ayez pas peur de cumuler plusieurs enveloppes, c’est même recommandé ! “Il n’existe aucune limite sur le nombre de contrat que l’on peut détenir et il faut en profiter”, affirme Olivier Sentis, directeur général de l’assureur MIF. Cela vous permet de confier votre épargne à différents professionnels : mutuelle, compagnie d’assurance, banque…
Ensuite, pour prendre la meilleure décision, faites le point sur votre ancien produit : bénéficiez-vous de clauses aujourd’hui disparues, tel un taux minimum garanti avantageux ? C’est encore le cas sur quelques monosupports… à conserver précieusement. Mais souvent, c’est la fiscalité qui guidera votre action. Ainsi, n’oubliez pas que les primes versées avant 1998 sur les vieux contrats bénéficient d’une exonération totale d’impôt. Il serait malvenu de récupérer ces sommes pour les placer dans une enveloppe moins bien traitée. Les épargnants âgés de plus de 70 ans conserveront leurs contrats “antiques” souscrits avant novembre 1991 s’ils y ont réalisé d’importants versements avant octobre 1998, ceux-ci n’étant pas taxables lors du décès. Plus généralement, “garder son vieux contrat permet de bénéficier de son antériorité fiscale car on se sait jamais comment vont évoluer les règles, estime Vincent Crugeon, directeur du développement de Primonial, groupe de gestion patrimoniale. Peut-être que dans vingt ou trente ans, il sera intéressant de réaliser de nouveaux versements sur cette enveloppe.”
Conserver une enveloppe ne veut pas nécessairement dire que l’on ne va pas puiser dans cette épargne. Des rachats progressifs peuvent être réalisés, sans être imposés, dès lors que le contrat a plus de huit ans. Il suffit de respecter les limites d’abattement sur les gains (4 600 euros pour un célibataire et 9 200 euros pour un couple) et de reverser ces sommes sur un contrat sans frais d’entrée.
Enfin, les détenteurs d’un monosupport de piètre qualité peuvent jouer la carte “Fourgous”, qui consiste à transférer ses avoirs, au sein d’une même compagnie, d’un contrat en euros à un multisupport en conservant l’antériorité fiscale. “A condition d’avoir une appétence au risque suffisante, opter pour un Fourgous peut être une solution, notamment pour les clients qui ont versés des primes avant 1998”, estime Olivier Sentis. Attention, vous devez impérativement placer 20 % de votre encours sur des supports à risque, à choisir parmi les unités de compte du contrat, hors Sicav monétaires. Un schéma à étudier mais qui ne conviendra pas à tous.
Le plan d’épargne retraite populaire (Perp) et le contrat retraite Madelin, dédié aux libéraux, commerçants et artisans, sont deux produits d’épargne qui prévoient une sortie en rente au moment de la retraite. Les versements réalisés sur ces enveloppes sont déductibles des revenus imposables, dans certains plafonds,
Ce que vous ne pouvez pas faire. Sauf cas de déblocage exceptionnel (invalidité, décès du conjoint…), ces enveloppes ne peuvent pas être clôturées avant leur terme, c’est-à-dire votre retraite. Pour les Perp, la loi Sapin 2, votée à la fin de 2016 vient d’autoriser la liquidation de ceux dotés de petits montants, mais sous des conditions très strictes : l’enveloppe ne contient pas plus de 2 000 euros, vous n’avez pas réalisé de versement depuis quatre ans et vos revenus sont faibles. Encore plus contraignant, le Madelin prévoit une obligation de dépôt annuel. “Il faut verser une somme minimale, contractuelle, faute de quoi le titulaire risque une requalification de l’avantage fiscal”, explique Philippe Landré, directeur général de la mutuelle d’assurance Ampli Mutuelle. Rien n’empêche en revanche de cumuler deux contrats Madelin et d’affecter ses versements sur un seul d’entre eux.
Ce que vous pouvez faire. Bonne nouvelle, ces deux enveloppes sont transférables, même si certains établissements traînent des pieds pour traiter les dossiers. Tablez sur un délai de quatre mois. L’opération est sans frais après dix ans, sinon comptez jusqu’à 5 % de l’encours. Pour les Perp, il faut néanmoins être attentif à une clause du Code des assurances (article R 144-27). Si une compagnie affiche des moins-values sur son fonds en euros au moment de la demande de transfert, la part d’épargne investie en euros peut être réduite à hauteur de 15 %. “Une telle situation ne se présente chez aucun assureur à ce jour mais cela pourrait changer d’ici dix à quinze ans”, souligne Pierre-Emmanuel Sassonia, fondateur de 163x, filiale d’Eres. Côté Madelin, un changement de statut professionnel peut inciter au transfert. “On peut garder un Madelin en sommeil, afin de reprendre les versements si, plus tard, on envisage de renouer avec le statut de libéral, sinon on peut le transformer en Perp”, précise Philippe Landré.
Dans un marché marqué par l’enthousiasme des acheteurs, rares sont ceux qui évoquent la liquidité des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI). Il faut dire que la “pierre papier” promet un investissement plus souple que l’immobilier en direct. Pourtant, quand les SCPI sont souscrites hors du cadre de l’assurance vie, mieux vaut anticiper la question de leur revente car il s’agit d’un investissement de long terme, conseillé sur une vingtaine d’années, un délai au cours duquel de nombreux grains de sable peuvent venir se glisser dans les rouages.
Ce que vous ne pouvez pas faire. Si vous avez opté pour une SCPI fiscale (Robien, Pinel…), oubliez toute idée de revente avant le terme du produit à moins d’accepter une très sérieuse décote puisque le repreneur ne bénéficiera pas de la carotte fiscale.
Ce que vous pouvez faire. Le dispositif de revente diffère selon qu’il s’agit d’une SCPI à capital fixe ou variable. Avec les premières, moins courantes, le nombre de parts est fixe donc il faut trouver un repreneur pour céder ses titres. “La société de gestion liste les vendeurs et acheteurs et organise ainsi le marché”, précise Nicolas Peycru, gérant associé d’Euodia Finance, société de gestion de patrimoine. Le prix résulte alors de la rencontre de l’offre et de la demande. Autrement dit, si votre produit est de piètre qualité ou si le marché immobilier s’est dégradé, il vous faudra consentir un effort sur le tarif. Mieux vaut éviter de vendre en cas de crise financière brutale et garder ses parts en attendant des jours plus heureux.
Pour les SCPI à capital variable, la situation est plus simple puisque c’est le gestionnaire qui rachète vos parts… sous réserve d’avoir des acquéreurs. “Le marché est très fluide actuellement, vous pouvez revendre vos parts sous quinze jours car l’on observe huit fois plus d’acquéreurs que de vendeurs”, constate Nicolas Peycru. Si le marché venait à se gripper ou si la SCPI voyait sa qualité se déprécier, la revente serait en revanche plus compliquée et les délais pourraient s’allonger. Les sociétés de gestion ont la possibilité de se constituer un fond de remboursement pour prévenir ce genre de situation. Dans tous les cas, après six mois d’attente, elles doivent vendre des actifs pour faire face aux demandes de rachat. “Le principal risque dans un tel contexte, selon Nicolas Peycru, serait que le gestionnaire transforme son produit en SCPI à capital fixe, mais c’est une décision qui doit être approuvée en assemblée générale.”
Alléché par l’avantage fiscal lié à ces produits, vous avez souscrit un fonds commun de placement dans l’innovation (FCPI) ou un fonds d’investissement de proximité (FIP) ? Les années passant, vous vous interrogez sur la pertinence de cet investissement et préféreriez récupérer votre capital pour l’allouer ailleurs ?
Ce que vous ne pouvez pas faire. Las, la réduction d’impôt se paie comptant ! Les FIP et FCPI sont construits avec une durée de vie définie, pouvant atteindre dix ans. C’est généralement bien précisé lors de la souscription. Ce que l’on sait moins, c’est que l’avantage fiscal est lié à un engagement de détention d’au moins cinq ans. En cas de revente du support avant ce délai (sauf en cas de chômage, invalidité ou décès), vous devrez rembourser la réduction d’impôt.
Ce que vous pouvez faire. Au-delà de cinq ans, rien n’empêche de céder ses parts mais encore faudra-t-il trouver preneur ! Votre acquéreur ne pouvant pas bénéficier à son tour du coup de pouce de l’Etat, il risque de vous demander un effort important sur le tarif de la part. En outre, le marché n’est pas organisé, c’est donc à vous de trouver preneur même si le distributeur ou le gestionnaire du fonds peut vous apporter son aide. Enfin, certaines maisons prévoient une clause de rachat exceptionnel en cas d’invalidité ou de décès du souscripteur ou de son conjoint. Dans ce cas, elles acquièrent elles-mêmes les parts.
Ils sont 8,7 millions de Français à avoir bénéficié d’un dispositif d’épargne salariale en 2014 selon les derniers chiffres du ministère du Travail. Mais, par méconnaissance des dispositifs, une infime partie d’entre eux pilotent activement leur plan d’épargne entreprise (PEE), leur plan d’épargne retraite collectif (Perco) ou encore leur contrat retraite article 83.
Ce que vous ne pouvez pas faire. Nous sommes en présence de produits collectifs, mis en place par l’entreprise pour tout ou partie de ses salariés. Vous ne choisissez donc ni l’accès à ces enveloppes ni leurs spécificités. En clair : vous devez faire au mieux avec ce que l’on vous propose !
Ce que vous pouvez faire. Vous n’avez aucune obligation de versement sur ces enveloppes, à l’exception de certains articles 83. Leur fiscalité avantageuse doit néanmoins vous inciter à y regarder de plus près. Si votre épargne salariale vous paraît peu performante, c’est peut-être que vous ne misez pas sur le bon support. Au sein du PEE, le fonds proposé par défaut est monétaire. Penchez-vous sur l’offre et effectuez une allocation plus cohérente avec votre horizon de placement.
Si vous avez également la possibilité d’épargner sur un Perco, le choix de l’enveloppe peut s’arbitrer, le cas échéant, en fonction de l’abondement de votre entreprise. Ce produit, dédié à la retraite, est plus contraignant car il est bloqué jusqu’à cette échéance (contre seulement cinq ans pour le PEE) et les modalités de sortie anticipée sont plus restrictives. En revanche, il donne accès à une rente viagère à la fiscalité légère. A l’approche de la retraite, il peut donc être judicieux de transférer ses avoirs d’un PEE vers un Perco pour augmenter le montant de sa rente.
Après avoir quitté votre entreprise, vous pourrez conserver vos enveloppes mais les frais seront à votre charge (quelques dizaines d’euros par an en moyenne). “Lorsque c’est possible, mieux vaut tout regrouper chez son nouvel employeur surtout s’il s’agit de petits montants”, recommande Olivier de Fontenay, associé d’Eres, spécialisée dans l’épargne salariale. Pour un article 83, une option supplémentaire s’offre à vous : transférer votre épargne sur un plan d’épargne retraite populaire (Perp). Mais prudence ! Car les produits à sortie en rente sont complexes et nécessitent de bien comparer les caractéristiques des enveloppes. “Dans un article 83, la table de mortalité est figée au moment de la souscription, ce qui n’est pas le cas d’un Perp”, cite en exemple Olivier de Fontenay.
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