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Taxation de lhéritage : bas les abattements pour lOCDE | Crédits photo : 360b / Shutterstock.com Taxation de l’héritage : bas les abattements pour l’OCDE
L’entraide familiale est importante dans les familles françaises

” src=”/medias/2021/10/15/1984609_1634722351_p20-intro_74x39.jpg” /> Donations : comment aider un proche sans payer d’impôts ?
A quelques mois des présidentielles, la dernière note* du Conseil d’analyse économique (CAE), qui fustige la fiscalité française sur l’héritage, ne devrait pas passer inaperçue. « Nous sommes désormais dans un monde où il devient indispensable d’avoir hérité pour accéder à des niveaux de vie élevés. C’est une société où l’on oublie le mérite du travail, juge, sévèrement, Camille Landais, économiste au CAE, coauteur de cette note. Dans les années 1970, les Français nés vers 1920 n’avaient que très peu de patrimoine dont ils avaient hérité. Depuis, le flux successoral a presque doublé en trente ans ! »
Par « flux successoral », le CAE, qui dépend de Matignon mais assure s’être autosaisi du sujet, entend par là les successions mais aussi toutes les donations réalisées entre proches au cours de la vie (déclarées ou non). Il part d’un constat simple : après un reflux des inégalités de patrimoine après la Première Guerre mondiale, « l’héritage redevient un facteur déterminant dans la constitution du patrimoine », observe le CAE. En 2020, en France, 60 % du patrimoine d’un Français provient de l’héritage, contre 35 % au début des années 1970.

 Retour de l'héritage

 Retour de l'héritage

 Retour de l’héritage | Crédits photo : CAE

Pourquoi cette tendance effraie-t-elle les économistes ? « Avec ce retour de l’héritage dans les patrimoines, il y a désormais un vrai danger en termes d’égalité des chances », s’alarme Camille Landais. Car cette inégalité est « fondée sur la naissance » et non sur les revenus du travail. Ainsi, selon leurs données, la moitié des individus héritent de moins de 70.000 € de patrimoine tout au long de leur vie, tandis que 10 % sont gratifiés de plus de 500.000 € et que 0,1 % reçoivent 13 millions ! Cette « extrême concentration des héritages » pourrait se traduire à long terme par une hausse de la concentration de la richesse, ce qui est loin d’être bon pour les systèmes économiques. Le CAE cible en particulier les plus riches qui touchent un héritage 180 fois plus élevé !
Autre problème, qui pèse sur le PIB, « 60 % à 65 % du patrimoine transmis échappent à l’impôt », informe Camille Landais. Et ce alors même que le flux total des transmissions patrimoniales annuel représente désormais plus de 15 % du PIB selon les calculs du CAE ! Le système fiscal français est jugé inefficient.
Les causes sont multiples : la faute à un système de collecte des données défaillant au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), mais aussi à une taxation des donations et des successions pas si progressive, qui pénalise beaucoup les transmissions en ligne indirecte (par exemple d’un frère à une sœur, d’une tante à un neveu, etc.), et à une multitude de niches fiscales… dont « les justifications économiques sont faibles », selon le CAE.
Le CAE a ainsi dans le viseur les multiples exonérations existantes : le pacte Dutreil (jusqu’à 75 % de la valeur des biens professionnels transmis), le démembrement de propriété, qui permet de donner la nue-propriété de son vivant (seule base alors taxable, à hauteur de 45 % seulement en moyenne, selon la note du CAE), et… l’assurance-vie, dont les sommes échappent en grande partie aux droits de succession. « Elles sont soit totalement exonérées soit taxées selon un barème ad hoc qui ne dépend pas du lien de parenté », rappelle le CAE. Or, rien qu’en 2019 (dernières données disponibles), plus de 44 milliards d’euros ont été transmis via l’assurance-vie ! Le manque à gagner pour l’administration fiscale est donc énorme. D’autant que ce sont surtout « les gros patrimoines qui utilisent de façon très agressive l’ensemble des dispositifs antifiscaux », remarque Camille Landais. Une méconnaissance certaine de la population sur la fiscalité liée à l’héritage déséquilibre encore plus le système.
Pour rendre le système plus égalitaire et moins favoriser les plus riches, le think tank propose une remise à plat totale de la fiscalité et une réforme bâtie sur quatre piliers pour « renforcer la progressivité de l’imposition de l’héritage ».
Le principal, et certainement le plus révolutionnaire, consisterait à mettre en place une taxation sur le flux successoral total perçu tout au long de la vie et non plus sur le montant d’une transmission à un instant T. « A chaque transmission, on recalcule le taux d’imposition sur l’ensemble de ce qui a déjà été reçu », explique Camille Landais. A titre d’exemple, un héritier payerait le même montant d’impôt s’il reçoit 700.000 € en une fois d’un de ses parents à son décès, ou s’il reçoit durant sa vie trois donations de 100.000 € (qui peuvent actuellement bénéficier d’abattements) et 400.000 € de ses parents à leur décès. Le système, qui existe déjà en Irlande, est défendu par l’OCDE et par le rapport des économistes Olivier Blanchard et Jean Tirole, remis en juin dernier à Emmanuel Macron.
Parallèlement, une refonte de l’assiette des droits de succession serait opérée, tout en éliminant notamment (sans surprise) les principales exemptions ou exonérations. Ainsi le CAE propose-t-il de réintégrer l’assurance-vie dans le barème des droits de succession, mais aussi de supprimer les avantages fiscaux liés au démembrement de propriété. Il ne prône pas la suppression du pacte Dutreil, car il se justifie économiquement, mais une multiplication des contrôles fiscaux. Autant dire qu’avec un tel système, il y aurait clairement une explosion de la fiscalité…

 Les scénarios du CAE et l'explosition de la fiscalité

 Les scénarios du CAE et l'explosition de la fiscalité

 Les scénarios du CAE et l’explosition de la fiscalité

Enfin, les économistes du CAE plaident pour l’instauration d’un « capital pour tous garanti », versé à 18 ou 25 ans, « pour limiter les inégalités les plus extrêmes » dans l’accès à la formation ou au logement, par exemple. La note évoque une garantie versée pouvant aller jusqu’à 40.000 €. « Bien sûr, les inégalités sont si fortes et leur problématique complexe, ce capital pour tous ne réglerait qu’une partie du problème », reconnaît Camille Landais.
L’impôt sur les successions sera certainement dans tous les programmes des candidats à la présidentielle. Les Républicains et l’extrême droite s’accordent à vouloir alléger encore cette fiscalité, tandis que Jean-Luc Mélenchon, sans surprise, veut l’alourdir au maximum. Pour l’heure, ni Emmanuel Macron ni ses ministres n’ont commenté cette note.
* « Repenser l’héritage », note no 69 du Conseil d’analyse économique, de Clément Dherbécourt, Gabrielle Fack, Camille Landais et Stefanie Stantcheva, décembre 2021.
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