Les arguments Pour : une franc-maçonnerie au service de tous
Les arguments Contre : une franc-maçonnerie réservée aux élites
Liberté, égalité, fraternité. C’est la devise française qui accueille les internautes sur le site du Grand Orient de France. D’ailleurs, la démocratie est un des principes fondamentaux énoncés dans la charte des valeurs de la principale obédience française, consultable sur leur site : « Le Grand Orient de France est historiquement lié aux principes fondateurs de la République et considère qu’ils ne doivent être détournés de leur sens par quiconque, homme ou groupe ». Laïque, tolérante, l’organisation s’oppose au racisme et aux ennemis de la démocratie.
Pour la Grande Loge Nationale Française, issue de la branche dite « anglaise » de la maçonnerie, croire en Dieu, « Grand Architecte de l’univers » est un pré-requis essentiel, bien que le mouvement défende le respect des opinions et croyances de chacun dans son règlement. Si cette obédience n’accepte pas les femmes francs-maçonnes, d’autres sont ouvertes à une mixité érigée en principe universel, à l’image de la Fédération française du Droit humain ou de la Grande Loge féminine de France. Respect de l’autre, droits de l’homme, soumission aux lois… et surtout point de gourou délivrant de parole sacrée. Les principes de la maçonnerie seraient profondément démocratiques et au service de tous.
« Faire avancer concrètement la société ». C’est le credo des obédiences maçonniques. C’est-à-dire favoriser les connaissances, le progrès humain et social, avec pour objectif d’améliorer la société. C’est un objectif symbolisé également par le rituel initiatique effectué à l’occasion de l’admission : le nouveau membre d’une loge passe des Ténèbres à la Lumière, un véritable cheminement intérieur pour perfectionner intellectuellement et socialement l’Homme. En 2012, le Grand Orient de France s’était notamment opposé aux propos tenus par le cardinal André Vingt-Trois concernant la loi sur le mariage homosexuel. Dans un communiqué rendu public, l’obédience maçonnique avait fustigé les positions du cardinal, jugées « arriérées voire obscurantistes, en décalage complet avec les nécessaires évolutions sociales et politiques de notre temps ».
Les obédiences maçonniques entretiennent d’ailleurs de nombreux liens avec les partis politiques (sauf le Front National). Dans un reportage diffusé sur M6 en juin 2017, Christophe Habas, grand maître du Grand Orient de France, rappelle que la Franc-Maçonnerie reste très écoutée même si elle a perdu son influence dans la sphère politique. En bref, les francs-maçons travailleraient à l’amélioration matérielle et morale des individus afin de construire une société plus juste et plus éclairée.
La Franc-maçonnerie cultive la sagesse, et serait une philosophie de vie à appliquer au quotidien afin d’en faire bénéficier le plus grand nombre autour de soi. Il s’agit de la Franc-Maçonnerie dite spéculative, qui prend le relais dès le 18ème siècle de la Franc-Maçonnerie opérative, celle des constructeurs de cathédrales. Selon Marc Halévy, physicien et philosophe, cette Franc-Maçonnerie est d’abord un art de vivre. Dans son livre « Philosophie maçonnique », publié en 2008, l’auteur français explique : « Le franc-maçon cultive la parfaite maîtrise de l’art d’être homme utile à l’oeuvre. Devenir pierre pour le temple de l’Esprit : pierre de fondation enfouie ou clef de voûte somptueuse, qu’importe pourvu qu’elle soit parfaite ». Il s’agit de la métaphore du maçon : le franc-maçon sculpte son esprit comme un tailleur de pierre afin de venir s’insérer dans une construction d’ensemble. Ainsi, si le cheminement du franc-maçon est intérieur, personnel, il a vocation à éclairer la société et à donc être au service de tous.
Faut-il avoir de l’argent et un positionnement social avantageux pour devenir franc-maçon ? Si les cotisations annuelles réclamées par les loges maçonniques ne sont pas très élevées, le puissant réseau des franc-maçons questionne. Combien de chefs d’entreprises, de politiques, ou de professions libérales en sont membres ? Peut-on faire du business dans les loges ? Si les francs-maçons déclarent être au service de la société et de l’Humanité, certains profiteraient du réseau pour remplir leur porte-monnaie.
« Ville par ville, les francs-maçons dans le business » titre cet article publié dans Capital. S’ils n’ont jamais été aussi nombreux, assure le magazine, c’est une confrérie qui reste «  haut de gamme ». Bien plus de cadres supérieurs que d’ouvriers sont présents dans ses rangs. La Franc-Maçonnerie française comporterait de 25 à 33% de patrons dans ses rangs, selon cet article publié dans l’Express. Et certains chefs d’entreprises ambitieux cherchent, par leur adhésion, à assurer leur carrière. Les francs-maçons sont-ils au service de tous ou seulement d’eux-mêmes ? Une seule certitude, il sont présents dans les domaines les plus élitistes et influents de la société : ministères, gouvernement, tribunaux, administrations, BTP, banques… Bref, un réseau puissant et organisé.
Tout le monde ne peut pas en devenir membre. Le processus d’adhésion nécessite de la part de l’individu courage et patience : pour initier des apprentis, les loges ont encore largement recours à la cooptation. Le processus est long : une véritable enquête est menée pour que la loge prenne connaissance des motivations de l’individu. Si sa manière de penser ne correspond pas à ce qui est attendu, c’est le recalage assuré lors du vote d’admission. L’individu doit donc montrer patte blanche et respecter les valeurs de l’organisation. Finalement, cela sous-entendrait-il que tous les individus ne sont pas aptes à améliorer la société et participer aux débats ?
La Franc-Maçonnerie est également un univers très ritualisé, où le symbolisme est fort et omniprésent. Des pratiques « poussiéreuses et loufoques » dénoncées notamment par François Koch, journaliste à l’Express et auteur d’un blog sur la Franc-Maçonnerie.
Discrète et non pas secrète. C’est ainsi que les grands maîtres qualifient une Franc-Maçonnerie qui effraie autant qu’elle fascine. Christophe Habas, grand maître du Grand Orient de France, prône l’engagement public de l’organisation et l’ouverture, contrairement à d’autres obédiences. Pourtant, les francs-maçons restent auréolés de mystère : leurs activités ainsi que les sujets débattus au sein des loges sont méconnus. Progressiste ou conservatrice ? Moderne ou passéiste ? La Franc-Maçonnerie manque de transparence sur ses travaux et s’attirent par là de nombreuses critiques. Pourquoi ? Parce que cette discrétion conduit aux amalgames et aux théories complotistes, nous explique cet article publié dans l’hebdomadaire Le Point. Un culte du secret qui « sème le doute, intrigue, énerve même parfois. Surtout ceux qui n’en sont pas et voient dans la maçonnerie un système occulte et tout-puissant, où les petites gens n’ont pas leur place ». Une situation qui entretient le mystère et ne sert ni les intérêts défendus par la Franc-Maçonnerie, ni l’intérêt plus global de la société.
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