A partir du 2 août prochain, tous vos conseillers financiers vous poseront des questions sur vos préférences en matière de finances durables.
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A partir du 2 août prochain, lorsque vous pousserez la porte du bureau de votre banquier ou de tout autre intermédiaire offrant un conseil en investissement ou un service de gestion de portefeuille, attendez-vous à être passé sur le gril. Ces professionnels sont déjà tenus d’interroger leurs clients pour établir leur profil de risque. Ce dernier repose sur plusieurs caractéristiques tel que le montant du patrimoine, la connaissance des produits financiers, l’horizon de placement, l’appétence au risque… “Avant chaque souscription, nos conseillers réalisent un questionnaire client, précise Laetitia Bernier, directrice commerciale et marketing chez le gestionnaire de fonds immobilier Perial. Il s’agit d’une étape de découverte de l’épargnant avec pour objectif de connaître ses souhaits de projets d’investissements pour ainsi proposer des solutions en adéquation.” A partir de cet été, les distributeurs de produits d’épargne (assurance-vie, plan d’épargne en actions, compte titres, fonds…) devront, en plus, vous interroger sur vos préférences en matière de finance durable. 
Cette nouvelle obligation fait partie d’un vaste chantier réglementaire qui s’impose au secteur financier. “Cette nouvelle réglementation s’inscrit dans l’agenda européen visant à réorienter l’épargne vers des produits responsables”, note Laetitia Bernier. Et ainsi diriger les capitaux vers les activités vertes, qui contribuent à la neutralité climatique décidée par l’Europe. A priori, les épargnants devraient se montrer favorables aux produits d’investissement intégrant des critères extra-financiers, environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG). Selon la dernière édition du baromètre de l’investissement responsable de CPR AM, 64% des épargnants interrogés placent l’impact extra-financier de leurs investissements au moins au même niveau que la performance financière. 
Mais les textes vont beaucoup plus loin que simplement demander si vous souhaitez privilégier des produits responsables. Les distributeurs devront vous sonder sur trois points bien définis, “du plus précis au moins précis”, souligne Thibaut Mihelich, directeur de l’ESG chez Lazard Frères Gestion, une société de gestion. Tout d’abord, ils devront vous demander quelle part minimum de vos investissements vous souhaitez aligner avec la taxonomie européenne. Il s’agit d’une classification très précise des activités vertes, celles qui contribuent à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique, au contrôle de la pollution, à la transition vers une économie circulaire, à la protection de la biodiversité… Cette approche est très stricte car selon les estimations de la Commission européenne, ces activités représentent seulement 1% à 2% du chiffre d’affaires des entreprises cotées à l’heure actuelle. En pratique, demander à être aligné avec la taxonomie pour la totalité de ses investissements conduirait à concentrer son patrimoine sur un nombre d’entreprises et de secteurs très limités et donc à prendre beaucoup de risques. 
La deuxième question est plus large et concerne la proportion d’investissements durables désirée. La définition est cette fois beaucoup moins précise et plus large puisqu’elle n’inclut pas que la dimension environnementale mais aussi sociale (emploi, égalité homme-femme, respect des salariés…). Chaque société de gestion devra indiquer et justifier la part de ses investissements durables dans ses produits, selon une méthodologie qui reste encore à déterminer. Le risque ? Voir émerger des approches très différentes, plus ou moins sérieuses, d’un promoteur à l’autre. “Au fil du temps, nous verrons une homogénéisation de la définition d’un investissement durable”, assure Thibaut Mihelich. 
Enfin, les conseillers interrogeront leurs clients sur leur souhait de ne pas investir dans des entreprises dont l’activité impacte négativement l’environnement. En effet, d’ici la fin de l’année, les sociétés devront rendre des comptes sur un certain nombre d’indicateurs afin de mesurer les conséquences de leur activité sur le réchauffement climatique, la perte de biodiversité… Elles devront renseigner 14 indicateurs. “Les gestionnaires de fonds devront prouver qu’ils favorisent les entreprises qui sont les meilleures sur ces points”, précise Thibaut Mihelich. A ce stade, il sera impossible de rentrer dans les détails mais à l’avenir, chaque épargnant pourrait mettre en avant les critères les plus importants à ses yeux. 
La bonne mise en oeuvre de cette nouvelle réglementation, relativement complexe, nécessite de faire preuve de beaucoup de pédagogie auprès des épargnants. “Un des enjeux sera donc de vulgariser au maximum l’ensemble des termes et jargons techniques en utilisant un vocabulaire simple pour être compréhensible de tous”, commente Laetitia Bernier. En parallèle, les sociétés de gestion oeuvrent pour créer de nouveaux produits afin de mieux répondre aux attentes qui seront révélées par ce nouveau questionnaire. “On s’attend à une montée en puissance des exigences des clients”, souligne Thibaut Mihelich. Les conseillers eux, ont encore, quelques semaines pour bachoter le sujet. 
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